Derrière chaque grand homme se cache une femme, dit-on couramment, le moins que l’on puisse dire c’est que ce n’est pas le cas d’Elodie, elle est exactement le contraire de ça, elle n’est ni derrière, ni devant Jean-François Piège, elle est simplement à côté. En couple, dans le vrai sens du terme.
Petit retour en arrière
A 17 ans, elle choisit de faire des études de Commerce, Ecole de commerce, prépa à HEC, Sup de co… Tout la destine à suivre cette voie. Pour faire le stage en entreprise qui signe la fin des études, elle décide de partir à Cannes, rejoindre des amis.
Arrivée là bas, elle s’aperçoit qu’à part l’hôtellerie de luxe, il n’y a pas grand chose…
Qu’à cela ne tienne, elle dépose son CV dans plusieurs établissements, c’est au Martinez qu’on va lui proposer quelque chose, mais pas du tout dans le commercial, dans le service communication, elle n’y connaît rien, mais elle accepte.
Elle est intelligente, travailleuse, curieuse et très sociable, la directrice de la communication du palace ne tarde pas à reconnaître toutes ces qualités, essentielles dans ce métier. Elle est vraiment faite pour ça, elle va rester 2 ans au Martinez. Avec de plus en plus de responsabilités.
Au cours de ces années, elle découvre auprès de Christian Willer, le chef étoilé du restaurant « La Palme d’Or », un univers qu’elle ne connaît absolument pas, celui de la grande cuisine française.
Mais elle est jeune et a envie d’autre chose. Après un bref retour vers ses racines familiales et toulousaines, elle s’installe à Paris et commence à chercher un nouveau job.
Le destin est en marche lui aussi…
L’ancien directeur du Martinez vient de prendre la direction du Crillon, il l’appelle pour lui proposer de venir s’occuper de la communication de l’illustre hôtel parisien. Au Crillon il ne se passe pas grand chose, on parle travaux, mais ça n’avance pas vite. En revanche côté restaurant, il y a Jean-François Piège et ses 2 macarons Michelin, on espère le troisième, là il y a matière à communiquer.
La première rencontre avec le chef n’est pas très enthousiasmante, il la salue d’un « bonjour » un peu froid.
Il faut dire que cette jeune fille n’a pas vraiment les codes de l’attachée de presse parisienne, elle affiche une décontraction et un naturel déconcertants… Pas maquillée, les cheveux longs, pas attachés, habillée simplement. Ce n’est pas le genre « chignon, tailleur, talons hauts ».
Petit à petit l’entente naît entre ces deux-là. Et plus encore…. Deux ans plus tard, les voilà mariés. Leur complicité est évidente.
Mais l’étoile tant attendue n’arrive pas, Jean-François quitte le Crillon pour tenter une nouvelle aventure, la reprise, avec Thierry Costes, de la célèbre brasserie parisienne Thoumieux, tombée dans l’oubli depuis quelques années.
C’est un triomphe, le talent du chef s’exprime dans un genre différent, Thoumieux redevient une adresse parisienne incontournable, 2 ans plus tard, c’est l’ouverture d’une table gastronomique à l’étage. Carton plein ! Il récupère ses 2 macarons Michelin, mais toujours pas de troisième à l’horizon.
Elodie, toujours à son poste, s’ennuie, tant et tant qu’elle finit par quitter le Crillon.
Elle va passer quelques mois à voyager, elle a beaucoup travaillé depuis la fin de ses études, elle s’accorde un break. Et surtout, elle a besoin de réfléchir.
Entre Paris et ses allers et venues, elle imagine plusieurs scénarios : accepter une offre dans un autre palace parisien, monter une boîte de communication ? En tout cas, une chose est sûre, pas question de n’être que la Femme de…
Petit à petit, une idée germe, monter un restaurant, leur restaurant, un bistrot dans lequel la cuisine de Jean-François soit identifiable, mais sans le côté gastronomique. Evidemment pas question pour lui de quitter son rôle de grand chef, il continue chez Thoumieux à exercer son art avec le talent qu’on lui connaît.
En 2014, c’est la naissance de Clover.
Un minuscule restaurant, bourré de charme, dans Saint-Germain-des-Près qui, dès son ouverture, affiche complet. Elodie et Jean-François l’ont conçu à quatre mains, entièrement, en parfaite harmonie. La cuisine est évidente, les produits magnifiques, du pur Piège dans la simplicité. La critique est unanime, c’est une réussite.
L’ouverture signe la fin de la collaboration de Thierry Costes et Jean-François quelques mois plus tard.
2015, tout se précipite
Le projet du « Grand Restaurant », la table gastronomique de Jean-François se précise.
Elodie, enceinte, se retrouve confrontée à une épreuve bouleversante, son père disparaît en trois mois, atteint d’un cancer incurable.
Ce père, elle l’adore et l’admire, c’est son modèle, portugais, maçon, arrivé en France à 17 ans, il a construit une belle et très florissante entreprise. Il est charismatique, travailleur et généreux…
Plus besoin de chercher de qui tient sa fille…
Quelques semaines plus tard, elle accouche d’un petit Antoine, dix jours après Le Grand Restaurant ouvre ses portes dans le 8ème arrondissement.
Elodie est là, elle gère l’ouverture aux côtés de son mari, son bébé dans son bureau, au dessus du restaurant. Elle ne veut personne pour s’en occuper, elle assure tous les rôles tranquillement mais sûrement : épouse, mère, collaboratrice.
Amateurs et critiques gastronomiques se précipitent, une fois de plus on salue l’immense talent de Jean-François Piège, considéré comme l’un des plus grands chefs actuels.
Ses deux macarons continuent à le suivre…
2016, la famille Clover s’agrandit avec l’ouverture d’un restaurant consacré à la cuisson à la braise et à la rôtisserie, le Clover Grill. Viandes, volailles, poissons, légumes et fruits, tout est cuit au grill, sous la cendre, contre ou tout près des braises dans une grande cuisine ouverte sur la salle.
Le restaurant est situé en plein cœur de Paris, près du Louvre. Faut-il encore préciser que le succès est au rendez-vous.
Février 2017, le Michelin…
Cette année, il semblait absolument évident que Jean-François Piège décrocherait enfin la troisième étoile, mais non, toujours pas.
Pourtant tous les critères du Guide sont réunis au Grand Restaurant : la cuisine, l’une des plus belles du moment, le service efficace, et l’art de la table raffiné dans un décor moderne et confortable. Tout y est parfait et parfaitement rodé.
Alors ? Qu’est ce qui coince ? On est en droit de se poser la question.
Heureusement les clients, eux, ont trouvé depuis longtemps la réponse et viennent tous les jours goûter la cuisine éblouissante de Jean-François au Grand Restaurant.
Elodie a su trouver sa place auprès de son mari, elle l’a épaulé, conseillé, poussé sans jamais se perdre elle-même.
Dans un respect total l’un de l’autre, ils ont construit une petite entreprise familiale qui leur ressemble et dans laquelle ils s’investissent avec talent et passion.