Pontet Canet : premier de la classe ?

Depuis 2004, Alfred Tesseron pratique la biodynamie avec une foi à déplacer les croupes du Médoc. Dans le même temps, les vins du château Pontet-Canet ont rejoint le club très fermé des plus grands bordeaux. Coïncidence ou succès de la méthode ?

ALFRED TESSERON : PASSION ET EXIGENCE

Solide et rayonnant, Alfred Tesseron dirige aujourd’hui un domaine acheté par son père Guy en 1967. Intelligent et pragmatique, il a l’ambition chevillée au corps. Pas pour lui, pour son vin. Singulier itinéraire pour un homme qui aime le concret et le contact des choses. Voilà 20 ans, le hasard le fait croiser Jean-Michel Comme, un régisseur recruté par petites annonces. Ingénieur agronome et œnologue, l’homme bardé de dipômes pratique la viticulture bio dans le domaine familial. Il en parle à son patron et finit par le convaincre. Ensemble, ils vont parcourir un long chemin qui les conduiront à la biodynamie. Pour autant, Alfred Tesserron persiste et signe : « je ne suis pas écolo, ce qui m’intéresse dans cette aventure, c’est de ressentir les choses avec en ligne de mire permanente, la nécessité d’aller plus loin dans l’expression des vins du domaine. Mon ambition ultime, c’est d’élaborer des vins plus purs, plus droits, plus tendus. Et puis taquiner les Premiers Crus Classés demeure un challenge intéressant. »

BORDEAUX, LA BIODYNAMIE FAIT PEUR

Bordeaux a toujours aimé la tradition. Aussi énoncer le mot « biodynamie » suscite la crainte voire même la peur avec des idées macabres en filigrane. « Ce n’est ni une secte, ni une croyance, ni une pratique ésotérique assène Jean-Michel Comme. C’est plus simplement un retour vers les choses vitales. Le but ultime demeure la compréhension de la nature en établissant de nouvelles relations avec les pieds de vigne.

LE RETOUR DES CHEVAUX

Bien entendu, la biodynamie a entraîné une révision de la culture de la vigne. Plus de « vendanges vertes », cette opération qui consiste à couper des grappes de raisin durant l’été pour limiter les rendements. Plus d’effeuillage, la coupe des feuilles qui accélère la maturité. Les désherbants chimiques sont évidemment bannis et la protection de l’environnement et de l’intégrité de la plante demeurent au cœur de la culture. Résultat, les rendements se sont stabilisés naturellement autour de 35 hectolitres à l’hectare ? Voilà deux ans, trois chevaux bretons sont arrivés au château pour labourer la terre. Pas pour le folklore mais plus simplement pour éviter le tassement des sols. En une génération, les tracteurs sont devenus des monstres et le poids de leurs roues tue la vie entre les rangs de vigne. Au fond, cette nouvelle approche implique le respect de certaines valeurs, c’est une éthique. Pour Alfred Tessseron, le pied de vigne transmet un terroir, l’homme doit rester en retrait, ne pas intervenir.

LA SIGNATURE PAUILLAC

Pour autant, les fondamentaux de Pontet-Canet n’ont pas changé : c’est un pauillac. Autrement dit un vin qui trouve son génie dans les parcelles de graves garonnaises de cabernet sauvignon du Plateau, celles qui voisinnent avec Mouton-Rothschild. Il est complété par les grands merlots de Padarnac, des parcelles situées au bord de la Gironde et, depuis peu, par une touche de petit verdot qui apporte un côté épicé en enrichissant la complexité.

 
 
 
l’abus d’alcool est dangereux pour la santé
à consommer avec modération

Pour la vinification, le propriétaire laisse faire les choses pour que les sucres se libèrent lentement. Chaque cuve est suivie individuellement, un verre à la main afin d’éviter les automatismes. Et pour l’élevage, 50 à 60% de chêne neuf suffisent pour éviter les arômes qui ne sont pas dans le vin.

POUR OU CONTRE LA BIODYNAMIE ?

Au fond peu importe, la réponse se trouve au fond des verres… Depuis le millésime 2000, les vins de Pontet-Canet n’en finissent pas de progresser. Mieux, ils ont rejoint la cour des très grands tant ils impressionnent les critiques du monde entier. Leur style s’est dépouillé. Ampleur, harmonie et élégance, tout se combine. Les tanins dodus et enrobés se mettent au service d’un fruité pur et solaire pour composer une matière raffinée d’une folle élégance.
Reste à choisir son millésime. Depuis 2000, Pontet-Canet a tout réussi ou presque. Si le 2001 présente un style classique, le 2003 est régulièrement cité comme l’une des plus grande réussite dans ce millésime et le 2005 se révèle pure gourmandise. En attendant les 2006 et 2007, divinement prometteurs. Au départ de l’aventure, Alfred Tesseron voulait se frotter aux premiers de la classe. Mission accomplie.

Château Pontet-Canet 33250 Pauillac tél : 05 56 59 04 04
Site : www.pontet-canet.com
Visite sur rendez-vous